Edgar, Ou les tribulations d'un pendu

Ariel Pelaprat

Aux forges de Vulcain

  • Conseillé par
    27 mai 2015

    La corde déjà autour du cou, Edgar boit le dernier verre du condamné en racontant à un barman au bout du rouleau les événements qui l'ont conduit jusqu'à cette mise à mort annoncée. Il a quitté une ville en ruine, traversé un continent dévasté par les guerres et les épidémies, embarqué dans un vieux rafiot pour rejoindre un hypothétique El Dorado, au delà de la Méditerranée. Là, contre la promesse d'un lopin de terre et d'un certificat de nationalité, il a été enrôlé dans une guerre meurtrière. Échappant à tous les dangers, sauvant sa peau à chaque fois, Edgar voit pourtant son rêve d'une vie meilleure brisé par les fausses promesses de son nouveau pays.

    Cynisme, bassesse, vilénie... Dans une Europe post-apocalyptique, les bons sentiments n'ont plus cours. C'est le règne du chacun pour soi et tout est permis pour sauver sa peau. Abandonnés, miséreux, ceux qui ont survécu aux guerres et aux épidémies, tentent une traversée de la Méditerranée pour un exil vers un monde meilleur. De l'autre côté, ils sont accueillis par de sombres et belliqueuses dictatures. Le rêve se heurte à une sordide réalité. Le bonheur n'est pas au bout de l'exil, voilà qui n'est pas nouveau. Mais cette BD se démarque en choisissant d'inverser le flux migratoire du Nord vers le Sud. Là-bas, comme ici, on profite de la détresse de migrants prêts à tout pour un peu d'espoir. Les dessins en noir et blanc, aux traits parfois grossiers, contribuent à créer une ambiance dure et hostile, avec des paysages arides, des personnages aux mines patibulaires, certains allant jusqu'à ressembler à Khadafi. Les textes sont de la même veine alliant cynisme, pessimisme, humour noir. Une bien belle réussite que cette dystopie qui donne à réfléchir sur l'avenir de notre région du monde et nous met face à la façon dont nous traitons les migrants. A découvrir.