L'auberge du bord de la route
EAN13
9782358732031
ISBN
978-2-35873-203-1
Éditeur
Bruit du temps
Date de publication
Nombre de pages
80
Dimensions
17 x 11,9 x 1 cm
Poids
120 g
Langue
français
Fiches UNIMARC
S'identifier

L'auberge du bord de la route

Bruit du temps

Offres

Avec autant de naturel que, dans les grands poèmes de Quatuor, il retrouvait le ton et la voix des grands poètes lyriques du siècle der- nier, Emmanuel Moses, dans ce beau récit, s’inscrit dans la tradi- tion la plus ancienne qui soit, celle des conteurs venus d’Orient (on pense aux Mille et une nuits) ou d’Occident (Chrétien de Troyes et les romans du Moyen Âge sont plusieurs fois cités). Le titre est emprunté à Rimbaud, comme pour signifier dès l’abord que le conte et la poésie sont de même nature, mais l’« auberge verte » bien réelle qui lui sert de cadre (elle est tenue par deux citadins qui s’y sont instal- lés après avoir quitté la ville et leurs professions dans des buildings de verre et d’acier parce qu’ils avaient constaté que la vie qu’ils y menaient « les avait dépouillés des véritables mots »), est aussi le lieu immémo- rial à la source de tout récit, le lieu où des inconnus se rencontrent et, sous l’effet bienfaisant du vin, se mettent à raconter. Il y en aura trois : L’homme du Nord, l’homme de l’Ouest et l’homme de derrière les montagnes.
Mais avant même que ces trois hôtes de passage que le hasard a réunis ce soir-là à l’auberge ne donnent leur propre récit, celui de Moses, par la magie de la narration, nous donne à lire les pensées qui les préoc- cupent. Ce sont, comme les histoires qui suivront, des pensées dans lesquelles l’angoisse est présente — ainsi dans le cas de l’homme du Nord, des cris qui le hantent et qui mêlent l’histoire d’une petite fille et ceux des massacres de la grande Histoire — mais finira par se dissi- per comme un mauvais sortilège. De même, dans l’esprit de l’homme de l’Ouest, le souvenir des cimetières omniprésents au bord des routes au cours de son trajet en automobile sont contrebalancés par la beauté « de la lumière naissante » — et poignante — descendue du ciel pour éclairer et magni- fier le monde. La description du lieu, la manière dont les repas sont préparés, l’attention que les tenanciers portent à leurs hôtes de passage qui pourraient aussi bien être des dieux déguisés en mendiants, les réflexions et les souvenirs de tous les personnages, leur disposition d’esprit très particulière ce soir-là contribuent à faire de cette auberge une véritable utopie, un lieu de « bonne fortune », où le malheur personnel ou les horreurs du monde, ce que la femme de l’aubergiste appelle « la grande tempête », ne sont pas niés, mais comme suspendus, ouvrant à tous les possibles. Aucun étonnement alors si, dans les dernières pages du livre, quand le rideau s’est enfin levé, « marquant le début de la pièce » et quand les trois hommes prennent enfin la parole, leurs récits, qui sont des histoires d’exil, de migrants, sont placés — à rebours de tout ce qui s’écrit aujourd’hui — sous le signe d’un éloge des fins heureuses et l’affirma- tion d’un espoir : « le vent de l’espoir s’est levé, non pas pour lui, non pour ses contemporains, mais pour le futur », déclare l’homme de derrière les montages. Le texte s’achève sur le mot « joie ».
S'identifier pour envoyer des commentaires.