Cités 2010, n° HS (1), Voyages inédits dans la pensée contemporaine
EAN13
9782130580560
ISBN
978-2-13-058056-0
Éditeur
Presses universitaires de France
Date de publication
Collection
Cités
Nombre de pages
448
Dimensions
23,8 x 17,5 x 2,3 cm
Langue
français
Fiches UNIMARC
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Cités 2010, n° HS (1)

Voyages inédits dans la pensée contemporaine

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Figures majeures de la pensée contemporaine

Cités en inédits

Direction Yves Charles Zarka

Coordination Isabelle Eon et Cristina Ion

Amartya Sen, « Sur la société de marché »

Theodor W. Adorno, « L’éducation pour débarbariser »

John Rawls, « L’indépendance de la théorie morale »

Hermann Heller, « Démocratie politique et homogénéité sociale »

Norberto Bobbio, « Progrès scientifique et progrès moral »

Leo Strauss – Karl Löwith, « Correspondance (1932-1971) »

Stanley Cavell, « L’image de la femme dans le cinéma américain contemporain »

Raymond Boudon, « À quoi sert la sociologie ? »

Walter Benjamin, « Sur l’École de Francfort »

Jürgen Habermas, « De la tolérance religieuse aux droits culturels »

Ilan Greilsammer, « Observations sur la mémoire historique en Israël »

Emmanuel Levinas, « La compréhension de la spiritualité dans les cultures française et allemande »

Arthur C. Danto, « Le corps dans la philosophie et l’art »

Axel Honneth, « Héritage et renouvellement de la Théorie critique »

Paul Ricœur, « L’interprétation de soi »

Cardinal Lustiger, « Après la sécularisation, la légitimité de la foi : convergences retrouvées entre Juifs et Chrétiens » – Yeshayahou Lejbowitz, « Sur le prétendu “héritage judéo-chrétien commun” »

Robert Castel, « La citoyenneté sociale menacée »

Jacques Bouveresse, « Santé et maladie dansla philosophie et dans la vie »
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Cités Hors série 1

" La pensée est une aventure. La seule peut-être aujourd’hui à découvrir des espaces nouveaux.
Longtemps les penseurs, philosophes, romanciers ou poètes ont fait de la découverte du monde, donc du voyage au-delà de son lieu de naissance ou de résidence, une façon d’ouvrir la pensée à des territoires nouveaux, à la découverte de l’inconnu et de l’imprévu, à la reconsidération des choses à partir du point de vue de l’autre. Le voyage, qu’il fût réel ou imaginaire, était un élément indispensable du renouvellement de soi. Il l’était pour Montaigne ou Bacon, Montesquieu ou Stendhal, Göethe ou Benjamin, et beaucoup d’autres. Bien entendu, le voyage garde aujourd’hui ce statut. Il est essentiel à la pensée dans la mesure où il arrache celle-ci à l’autochtonie. Penser c’est en effet s’arracher et non résider, c’est aller voir ailleurs et non demeurer ici, c’est revenir après avoir fait l’expérience de l’étrangeté du monde. La pensée ne pense qu’en se déterritorialisant. Rester chez soi, dans son pré carré ou son chemin forestier, c’est risquer de manquer la dimension de l’altérité, finir par croire que son territoire, sa race, sa langue sont les lieux naturels de l’authenticité et de la vérité. C’est là que la pensée peut sombrer dans le désastre. L’histoire contemporaine nous l’enseigne amplement. Le penseur par essence est citoyen du monde, cosmopolite. Nous le savons depuis Platon : le philosophe, c’est l’Etranger.

Simplement aujourd’hui à l’heure où le voyage est devenu une industrie qui a envahi la totalité de la planète et où cette invasion se traduit par une homogénéisation accélérée, à l’heure donc où le voyage est moins l’expérience de l’étrangeté du monde que la volonté de se retrouver chez soi partout, quelque chose s’est brisé. Tout devient partout comme ici, mais sans la petite différence qui faisait chez Leibniz la variété infinie du monde. L’ère de la communication, que l’on a tant chantée dans la deuxième partie du XXème siècle, a été aussi l’ère de la destruction des différences, de l’imposition d’une langue d’échange d’une pauvreté désarmante, dans laquelle il n’est tout simplement pas possible de penser. La communication témoigne à cet égard d’une expérience exactement inverse de celle de la traduction : traduire c’est faire l’épreuve difficile, et même irréductible, de la différence. En somme, le tourisme a fait perdre le sens du voyage. La compensation pourrait-on croire est venue de la découverte de nouveaux espaces, les espaces virtuels illimités qui changent tout : les manières d’échanger, de connaître, de créer, de se lier. Cela n’est pas complètement faux. Beaucoup de choses ont changé et continuent de le faire avec l’internet. Mais en quel sens ? Est-ce dans celui d’une ouverture d’horizons nouveaux, de la multiplication des différences, de l’accroissement de la diversité ? Je ne le crois pas. L’internet produit le contraire : une homogénéisation accrue qui substitue à l’espace géo-temporel du monde, un espace plat, sans différence et sans temporalité. Le monde où le réel se restreint à l’immédiat. Malgré ce que l’internet peut avoir de positif, je ne crois nullement que l’aventure soit à chercher de ce côté-là.
La véritable aventure s’est désormais réfugiée dans la pensée…. "

Jean-Yves Zarka

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