Emily

Stewart O'Nan

Éditions de L'Olivier

  • Conseillé par
    27 juin 2012

    Elle vote républicain, elle préfère les chiens aux chats, elle va tous les dimanches à l'église...
    ...et pourtant, je serais tentée de dire qu'Emily, c'est moi avec le double de mon âge, ou vous, dans 20, 30, 40 ans...

    Parce qu'elle n'est ni une Super Mamie, ni une Tatie Danielle, mais juste une femme ordinaire, dont la vieillesse et l'approche de la mort déterminent souvent les actes, les pensées et les émotions.


    A bientôt 80 ans, Emily, veuve, vit seule avec son chien Rufus, dans un quartier paisible de Pittsburgh, Pennsylvanie. Ses habitudes ponctuent une routine tranquille mais pas vraiment oisive. Avec Arlene, sa belle-sœur, elle prend tous les mardis matins son petit-déjeuner à l'Eat'n Park, parce ce que ce jour-là, deux formules vous sont servies pour le prix d'une. Ensemble, elles participent ou assistent régulièrement aux manifestations culturelles organisées par leur commune, et se donnent mutuellement des nouvelles de leurs ami(e)s et connaissances, qui sont souvent mauvaises... Emily a d'ailleurs perdu récemment sa meilleure amie, Louise, à laquelle elle pense constamment.

    Il ne se passe rien d'extraordinaire dans le roman de Stewart O'Nan. Nous accompagnons le personnage principal dans son quotidien, avec ses petites contrariétés, les angoisses qu'occasionnent les imprévus ou la diminution physique liée à l'âge (la peur de conduire, de tomber), les souvenirs qui, souvent, surgissent à l'esprit.
    Les relations avec ses proches, notamment ses enfants et petits-enfants, qui vivent loin d'elle, sont parfois difficiles, car elle a du mal à trouver le ton juste, à leur livrer ses craintes sans les inquiéter, à les vouloir près d'elle sans se montrer trop insistante ou intrusive, à leur donner des conseils sans que cela passe pour des reproches...
    Vieillissant, l'individu semble ainsi se démunir de sa spontanéité, de son insouciance. Se focalisant sur l'espoir de "durer" jusqu'à la prochaine saison -il s'agit de ne pas être trop gourmand !-, il minimise ses projets, se contentant des petites satisfactions que lui apporte chaque jour.

    Il en résulte un récit parfois assez morne. Nous sommes loin, ici, du ton sombre et halluciné d' "Un mal qui répand la terreur", ou de celui, entre fantastique et épouvante, du "Pays des ténèbres"... "Emily" se rapprocherait davantage des "Anges dans la neige", du même auteur, par sa tonalité douce-amère, avec cependant une intensité dramatique moindre.

    Malgré cela, je me suis peu à peu laissée prendre par l'espèce de douceur qui émane du personnage d'Emily et par la justesse de l'ensemble. Sans grandiloquence, ni misérabilisme, Stewart O'Nan nous amène à comprendre profondément, par la signification dont il pare les détails du quotidien, son héroïne.


  • Conseillé par
    22 mai 2012

    Pennsylvanie, Pittsburgh. Emily quatre -vingt ans est veuve depuis plusieurs années. Ses deux enfants et ses petits-enfants habitent loin. A son âge, elle n’a pas à se plaindre de soucis de santé ou d’argent. Emily a du temps. Beaucoup de temps. Avec sa belle-sœur Arlene, elles ont quelques activités hebdomadaires mais cela ne comble pas toutes ses journées.

    Dans les nombreux romans qui fleurissent sur le thème de la vieillesse, celui-ci est différent. Point de maison de retraite ou d’humour noir ou d’héroïne qui n’a que pour but de tyranniser son entourage. Emily est quelqu’un d’ordinaire. Elle a eu une vie bien remplie avant mais maintenant à quatre-vingt ans, son quotidien est autre. Vous ne trouverez pas dans ce livre des aventures rocambolesques mais la vie d’une personne âgée. Une existence brodée autour d'habitudes qui quelquefois se trouvent chamboulées pour trois fois rien, l'attente et l'espoir que les enfants viennent pour les fêtes, les souvenirs, les amis qui décèdent et la solitude, les sorties avec Arlene au Club, la venue de la femme de ménage deux fois par semaine.

    Avec beaucoup de tendresse et de délicatesse, Stewart O’Nan nous décrit l’apprentissage de cette nouvelle vie. Le temps qui passe et qui décompte celui de l’existence, les moments de petits plaisirs,n’avoir pas peur de conduire. Et puis il y a des peines, des peurs. Quand Emily appelle ses enfants, ils sont souvent occupés et elle hésite de plus en plus à s’introduire dans leurs vies. La crainte que sa fille Margaret retombe dans l’alcool ou la drogue, les premiers vides du cerveau, la préparation du testament... Emily accepte que la roue de l'horloge tourne sans se plaindre et sans s’apitoyer sur elle-même.Elle accepte l’homosexualité de sa petite-fille, les choix de ses enfants et avec beaucoup de pudeur, elle s'inquiète pour les siens et leur avenir.

    Ce qui aurait pu être ennuyeux ne l’est pas, et il se dégage beaucoup de tendresse et d’humanité de ce livre ! Il s'agit d'un roman que j'ai refermé avec une boule d'émotions dans la gorge !