Les orageuses

Marcia Burnier

Cambourakis

  • Conseillé par
    6 décembre 2021

    VIOL

    Ce mot vous met tout de suite mal à l'aise, vous avez envie de passer votre chemin, faire comme si vous n'avez rien entendu.
    C'est comme si un sens interdit s'affichait subitement, nous demandant de faire demi-tour.

    Ce mot, pour tous ceux qui l'entendent mais qui n'ont jamais à l'utiliser, c'est un point. L'histoire s'arrête là, il n'y a plus rien à dire après.
    Mais pour celles qui l'usent couramment, ce sont trois petits points. Suspendus quelque part dans la bouche, qui s'arrêtent juste à la frontière des lèvres et qui retombent dans la gorge, se coincent et étouffent.

    "Les Orageuses", c'est un point d'exclamation. Le cri perçant qui redonne la voix à toutes ses femmes qu'on pousse au silence et qu'on oublie.
    C'est un cri libérateur qui parle de l'après, que l'histoire ne s'arrête pas au viol, que la vie continue sans que rien ne soit plus pareil, mais qu'il ne faut pas réduire ce passage de leur vie au seul statut de victime. Car ses femmes ont encore du pouvoir si seulement on voulait le voir.

    C'est un récit brutal car il ne cache pas les mots, ne les pose pas en demi teinte ou les enroule dans de jolies métaphores. C'est la voix des femmes qu'on vole, qu'on dépouille et que la société pousse au silence. C'est la voix des femmes qui décident de gueuler, de se battre, de reprendre possession de leur vie, de leur corps, de retrouver la justice et la confiance dont elles ont été privées.

    Au final, c'est un livre qui prouve que le viol n'obtient pas le dernier mot. Qu'il y a des pages et des pages après lui. Qu'elles s'envoleront peut-être au vent, seront raturées, déchirées mais qu'il y aura bien une suite et qu'elle aussi a le droit à la parole.